Campus Numeria : Poitiers au cœur du numérique éducatif
Dans le cadre de son numéro spécial sur le Campus Numeria, idruide a interviewé Bénédicte Robert, Inspectrice générale de lʼÉducation, du Sport et de la Recherche.
Ce projet est né en 2019, alors que je venais dʼêtre nommée rectrice de lʼacadémie de Poitiers. La mission confiée par le ministre de lʼépoque, Jean-Michel Blanquer, visait à concrétiser les ambitions de Poitiers « capitale de lʼéducation ». Lʼobjectif était notamment de développer un projet dʼenvergure, centré sur le numérique éducatif et partagé avec de nombreux acteurs — des opérateurs déjà présents sur le site du Futuroscope, lʼIH2EF (lʼinstitut de formation des cadres de lʼÉducation nationale), le Cned (spécialisé dans lʼenseignement à distance) et le Réseau Canopé (doté dʼune expertise dans la formation des enseignants). Ce noyau dur a été complété par lʼuniversité de Poitiers, qui dispose de laboratoires en sciences cognitives et en sciences du numérique ; lʼacadémie de Poitiers, en tant que service déconcentré du ministère et porteur de sa politique éducative ; les collectivités territoriales, notamment le département — le sujet du numérique éducatif étant dans son ADN —, le Grand Poitiers et le Conseil régional ; et bien sûr le Futuroscope.
Mon rôle était de fédérer les parties prenantes autour dʼun projet territorial, afin de construire une identité forte en matière dʼexpertise dans le domaine du numérique éducatif. C’est la raison dʼêtre de Poitiers « capitale de lʼéducation ». Pour le Campus Numeria, nous avons privilégié deux sujets de niche : dʼabord, la réalité virtuelle appliquée à lʼenseignement général mais aussi au développement des gestes professionnels ; ensuite, la citoyenneté numérique, en termes de montée en compétences mais aussi de prise de conscience des risques. C’est autour de ces deux piliers que les acteurs ont été rassemblés, ce qui a permis de définir la feuille de route avec lʼensemble des partenaires, et de pousser la réflexion sur ces deux sujets identifiés comme fils rouges de la démarche.
La France est un pays très centralisé ; dans le domaine de lʼéducation, cela permet de garantir lʼuniformité des programmes, du processus de certification des enseignants, etc. Pour autant, chaque territoire a des spécificités, des ressources, des axes de développement différents. Lʼenjeu consiste à articuler une démarche nationale dédiée au numérique éducatif, et une capacité locale à se mobiliser. Dans cette optique, le Futuroscope représente un rouage essentiel. Le fait de définir un thème moteur et fédérateur pour le territoire de la Vienne a permis de coconstruire, de faire travailler ensemble, de partager des expertises et savoir-faire, associant lʼÉtat, les collectivités, des institutions et des entreprises. Soit lʼopportunité dʼenvisager un rayonnement national à ce projet, qui a vocation à inspirer dʼautres initiatives sur la citoyenneté numérique et la réalité virtuelle.
Dʼabord, la forte volonté de chaque acteur de sʼimpliquer et de coopérer, dʼapporter sa pierre tout en se nourrissant des autres contributions, de travailler ensemble. Le changement dʼexécutif au Conseil départemental, avec un nouveau président, Alain Pichon, très intéressé par le projet, a contribué à sécuriser la démarche, tout comme lʼimplication du Conseil régional, avec qui des liens ont été établis dans le cadre de projets précédents, et celle de la présidente de lʼuniversité, nommée en 2020, qui a été particulièrement aidante.
Je pense aussi à lʼex-préfète de la Vienne, Chantal Castelnot, fortement mobilisée dans ce projet qui a tiré profit de la stratégie interministérielle des feuilles de route triennales des préfets. Celle-ci prévoyait des dotations de direction de projet, dont lʼune a été attribuée au Campus Numeria et a représenté un facteur majeur de réussite. Le projet a clairement bénéficié de la stabilité de lʼengagement des acteurs. Mais ce qui a permis à la mayonnaise de prendre, c’est lʼopportunité du Programme dʼinvestissements dʼavenir (PIA), dans le cadre de France 2030. Le PIA a permis de dégager des marges de manœuvre financières pour déployer des projets ambitieux, mais aussi de mettre autour de la table lʼensemble des acteurs et de contraindre à penser en logique partenariale.
Lʼune des forces du campus est de disposer dʼun lieu physique, au sein du Futuroscope. Il profite de lʼimage et du rayonnement du parc, tout en y contribuant. Je fais le pari que cette modalité pédagogique — le principe dʼun tiers lieu avec lequel lʼenseignant peut travailler, en amont dans la classe, puis lors dʼune sortie scolaire, enfin lors dʼune phase dʼexploitation — gagnerait, sur des questions numériques et autres, à être développée. C’est une orientation à privilégier pour développer les compétences du XXIe siècle, comportementales, transversales et psychosociales : il devient possible de les travailler en contexte scolaire, puis en plaçant les élèves dans dʼautres conditions dʼapprentissage, plus collaboratives, créatives, expérientielles, avec le concours des technologies numériques.
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