La santé mentale des élèves
Depuis quelques années, la santé mentale des enfants est prise en compte dans le cadre scolaire, mais les moyens manquent encore. La crise sanitaire a aggravé la situation, ce qui pousse à trouver un moyen d’assurer un meilleur suivi.
En septembre 2020, la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) a publié une vaste étude sur la santé mentale des élèves de 3ème, qui montre que plus d’un élève sur dix affiche une détresse psychique.
Un questionnaire a été distribué aux élèves pour évaluer la qualité de leur sommeil, leur comportement alimentaire, les blessures cutanées auto-infligées, ou encore leur comportement suicidaire. Ce travail a été réalisé en marge de l’enquête nationale de santé scolaire de 2016-2017, menée avec l’éducation nationale.
Les données sont « axées sur les comportements plutôt que sur les seules humeurs, trop fluctuantes à cet âge ». « L’enquête se veut plus descriptive qu’explicative », précise Valérie Carrasco, co-chargée de l’étude.
L’ensemble des données récoltées permet de dresser un constat. Les filles sont plus nombreuses que les garçons, parmi ceux qui souffrent. Les résultats montrent qu’un tiers des filles sont en détresse psychique contre un cinquième des garçons. « On retrouve là une constante des enquêtes en population générale adulte dans lesquelles la santé mentale est en générale ressentie comme plus mauvaise par les femmes », note la Drees.
S’il est encore tôt pour en dresser un bilan précis, le Covid est depuis passé par là. Les premiers signes montrent déjà des perturbations plus fortes et plus largement répandues chez les jeunes depuis le début de la pandémie.
Ainsi, fin 2021, on estimait à 20 % des 15-24 ans qui souffrent de symptômes dépressifs, selon la Défenseuse des droits, soit plus du double par rapport au niveau pré-Covid. Pendant le premier confinement, 13% des enfants de 8 à 9 ans ont subi des troubles socio-émotionnels. C’est pourquoi Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’Éducation nationale, a répété combien il était important que le personnel éducatif veille au « bien-être » des enfants.
Dans les établissements scolaires, ce sont les PsyEN, psychologues de l’Éducation nationale, qui sont devenus les référents sur la santé mentale des élèves. Les PsyEN organisent des permanences, accueillent, écoutent, conseillent les élèves en fonction de leurs besoins.
La volonté de prendre en charge la santé mentale des élèves se heurte au manque de moyens pour accomplir pleinement cette ambitieuse mission. On compte aujourd’hui près d’un PsyEN pour 1 500 élèves. Cela reste bien moins que les 4 700 conseillers d’orientation dans les années 80. Un tiers d’entre eux sont aujourd’hui contractuels, un chiffre en constante augmentation, car les départs à la retraite ne sont pas remplacés.
De plus en plus d’établissements scolaires font appel à des prestataires libéraux, mais aussi à des associations. Le gouvernement a lancé au printemps 2021 des chèques psychologiques destinés aux enfants et adolescents, de 3 à 17 ans, pour rembourser jusqu’à dix séances avec un thérapeute du privé.
Selon l’Unicef : « les troubles mentaux diagnostiqués, notamment le trouble déficitaire de l’attention/hyperactivité, l’anxiété, l’autisme, les troubles bipolaires, ou encore les troubles du comportement, peuvent avoir des effets néfastes considérables sur la santé, l’éducation, la qualité de vie et la capacité à obtenir un revenu des enfants et des jeunes ».
Bien qu’il ne soit pas possible de calculer les répercussions de ces troubles sur la vie des enfants, une nouvelle analyse de la London School of Economics, qui figure également dans le rapport de l’Unicef, souligne que la contribution aux économies perdue en raison des troubles mentaux entraînant un handicap ou un décès parmi les jeunes est estimée à près de 390 milliards de dollars par an.
Dans son rapport, l’Unicef apporte des pistes pour remédier au problème, tout en soulignant que de nombreux facteurs personnels (attention des parents, situation politique d’un pays, nécessité d’utiliser la pédagogie différenciée, etc.) contribueront toujours à la santé mentale des enfants.
Parmi les solutions proposées, on retrouve :
- l’investissement dans la santé mentale des enfants et des adolescents dans tous les secteurs, et pas seulement celui de la santé, afin de soutenir une approche de la prévention ;
- l’intégration et le déploiement à grande échelle des interventions fondées sur des données probantes dans les secteurs de la santé, de l’éducation et de la protection sociale, notamment des programmes d’éducation parentale qui promeuvent des soins réactifs et bienveillants ;
- briser le silence qui entoure la maladie mentale, en éliminant la stigmatisation et en favorisant une meilleure compréhension de celle-ci, ainsi qu’en prenant en compte le vécu des enfants et des jeunes.